mardi 3 juillet 2012


Elle continua sa route et échangea les derniers mots de sa vie avec un boudhiste, sûrement la personne la plus pûre de ce dôme.
Elle admirait cet être, et fut soulagée en un sens de partager sa mort prochaine avec. Il désirait l'aider, il la comprenait, il lisait en elle... Pourtant, elle refusa. 
Lorsqu'un être arrive au point de vouloir réellement mourir, l'envisager sérieusement, plus aucune aide ne peut lui être profitable.
Elle déambula ensuite dans les secteurs, à la poursuite de sa destinée. 
Elle monta tout en haut de la tour résidentielle, jeta ses affaires au dernier étage de celle ci, puis chercha comment accéder au toit. Elle trouva le petit escalier y menant et grimpa... La vue était impressionante, on pouvait voir tout Cybercity, la mairie, le poste des douanes... Elle s'approcha du bord du toit et fut secouée d'un violent vertige, manquant de s'effondrer.






La jeune femme, les bras écartés comme en équilibre sur une poutre en plein cours de gym, contempla le vide. Elle resta longuement ainsi, les yeux grands ouverts à ce dôme pourtant mort. Elle aurait pu avoir une bien plus belle mort, elle aurait préféré que la toxicité de l'air ne la cueille plutôt que de finir par sauter du haut d'un immeuble dans un dôme fait de taule.
Elle ferma les yeux, respira encore quelques bouffés d'air... Cet air qu'elle aimait tant. Elle s'y était attaché, comme à sa vie, comme à toute les personnes qu'elle avait connu et aprit à aimer, comme le ciel ou le vent qui lui avait été retiré lorsque ce monde est mort. 


Les gens lui semblaient comme des fourmis de là haut, elle les observa et leur suggéra par la pensée de vivre heureux, comme elle n'avait jamais réussi à le faire. 
Tout n'était qu'illusion, autant son optimisme que sa bonne humeur, que sa naïveté... Sa décision était prise depuis longtemps, en vérité. Elle abandonna son combat pour la vie lorsqu'elle " signa un pacte avec le diable " et cela, elle venait à peine d'en prendre conscience. 


Je suis prête, pensa-t-elle. Elle ne l'était pas vraiment, mais puisque sa vie avait été parée d'illusions, sa mort en serait de même. 
Elle plissa les yeux avec force, faisant rouler une ultime larme le long de sa joue. Elle respirait ses dernières bouffées d'air artificiel, profitait de ses dernières pensées claires, c'était la fin. Rien de plus, rien de moins.
Alors, tremblant comme jamais mais déterminé, son pied se souleva du sol. Il s'avança au dessus du vide. 
A présent, le plus dur était fait.
Tout son corps bascula naturellement en avant, ce n'était plus trop difficile à présent. La volonté l'avait faite arriver jusque la, le reste était de la rigolade.


Lentement, le poid de son corps bascula en avant, au dessus du vide fascinant et morbidement attractif. 
Elle avait tant de fois rêvé de faire ça...


Elle se sentit partir en avant, gouter au vide majestueux, à la liberté si jouissive et intense qu'elle en était mortelle. 
L'air gonfla ses cheveux, si bien qu'ils formèrent une auréole argenté autour de son visage angélique. 
Son débardeur se plaqua contre sa peau, ainsi que le tissu de son bas. Les bras écartés, elle regardait le sol et la mort se rapprocher à une vitesse grandiose d'elle. Bientôt, elle gouterait au sol, au repos si confortable. Bientôt, elle s'écraserait sur la mort.
La chute était terriblement longue, bien plus que Luna ne l'aurait imaginé. 
Elle dégusta ce moment de liberté intense, le temps s'étant complètement arrêté, tout ayant disparut autour d'elle, sinon l'éternité. 


Freud avait dit un jour qu'on ne pouvait point désirer mourir, car tout humain possède un amour inévitable pour la vie... Le suicide ne résultait que d'un dégout pour les choses désagréables de sa vie.
Lorsque cette pensée revint en mémoire à Luna, il était déjà trop tard. Elle ne pouvait plus dire " pouce " et remonter sur son toit si protecteur. Non, inévitablement, elle tombait.
Accepter la mort, la désirer, l'épouser, entrer en osmose avec elle... L'obscurité la plus totale et la plus pure possible.


En un dernier sursaut lucide, tandis que son corps allait percuter le sol, elle fut prise d'un violent élant d'amour pour la vie.
Et elle comprit. Elle comprit tout ce qui régissait la destinée de chacuns.


La mort fait parti de la vie, lorsque l'on aime la vie, inévitablement, on aime aussi la mort...


Elle aima la mort, et la vie, et lorsque son corps percuta le sol, le choc fut si violent que ses organes se décolèrent de la cage toracique.


Elle était déjà morte dans son esprit, à partir du moment où elle était montée sur le toit. A partir du moment où Daron était mort. A partir du moment même où elle était née, en fait...


Reposant à présent sur le ventre, ses yeux étaient presque paisiblement fermés. 
C'était la fin. Sa volonté et tant d'autres facteurs avaient mené la jeune femme un peu plus vite que prévu à la mort. 


Ce genre de repos est éternel...

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